Agoras et Témoins de vie

DIALOGUES EN HUMANITE :
PROMOUVOIR LA CITOYENNETE ACTIVE

Dimanche 8 juillet 2007, Agora 16 à 18 H
Comment faire pour que les citoyens n’abandonnent pas leur citoyenneté après les élections ? Comment permettre à chacun d’acquérir des « compétences démocratiques » et être acteur de sa vie, de la cité. Alors même que l’intérêt pour la politique reste forte chez les individus, le monde des institutions publiques est une énigme pour beaucoup. Le fossé se creuse ainsi de plus en plus, entre ceux qui ont accès à ce monde et la majorité de ceux qui l’ignorent. L’Internet a-t-il un impact dans la création de nouveaux espaces démocratiques ?
Quelles nouvelles modalités de citoyenneté peut-on imaginer ?

Avec Jean-Claude Richez (Institut National de la Jeunesse et de l’Education Populaire), Sossé Sossou (Bénin, France, écrivain/journaliste), n’a pas pu rester car son train avait été prévu pour 17 heures, Haïlé-Mickaël Tadelech (Ambassadeure d’Ethiopie), Ruth Stégassy (« Terre à terre » France Culture), Monsieur Kiflé Sélassié Beseat, poète, ancien directeur du Fonds International pour la Promotion de la Culture de l’UNESCO. Parmi le public, Ryadh Sallem triple champion d’Europe de basket.

Madame Haïlé-Mickaël Tadelech adresse ses remerciements aux organisateurs et exprime ses regrets de ne pas avoir pu venir plutôt. En préambule de son intervention, elle invite le public à faire une petite expérience. « Lorsqu’on parle de l’Ethiopie, qu’est-ce que vous comprenez ? ».
Plusieurs personnes s’expriment dans l’Agora.
L’éthiopie c’est un désert, une partie de l’Afrique. Un homme rapporte que son beau frère qui a séjourné en Ethiopie en tant que coopérant, a gardé un amour pour ce pays.

D’autres représentations sont évoquées : la famine, les conflits, la guerre, la géologie.
Madame Haïlé-Mickaël Tadelech : « L’Ethiopie, on pense qu’elle est désertique, alors que c’est le premier pays producteur de café, le premier cheptel d’Afrique (10ème rang mondial). L’Ethiopie a aussi un art culinaire (sauces, spécialités de lentilles, de légumes et d’épices). On dit qu’on épice les choses épicées, c’est le pays des épices. L’Ethiopie c’est une histoire, une culture de deux millénaires. Le pays n’a jamais été colonisé. On parle peu de l’Ethiopie, un pays qui est ni francophone, ni anglophone. Un peuple discret, introverti, cela vient sans doute des guerres de résistances. Ceux qui sont allés en Ethiopie viennent avec des idées toutes faites. Il y a des gens connus qui sont tombés amoureux de l’Ethiopie. On dit qu’un pays qui cesse de se nourrir de sa culture, cesse d’exister. On se nourrit de notre culture, on est fier de notre culture, de notre histoire de deux millénaires. Mais on souffre d’une image qui n’est pas représentative de notre histoire, de l’image construite par les médias sur l’Afrique. Les médias filment seulement la guerre, la famine. Est-ce que les caméras ne peuvent voir autre chose ? Les news traitent seulement des crises, les médias ne font pas du bien car ils privent la population d’informations, de dialogues. La responsabilité est partagée par tout le monde, on ne laisse pas les gens participer, s’investir ».

L’animateur : Comment vous avez essayé d’agir pour que la responsabilité soit partagée ?

Madame Haïlé-Mickaël Tadelech «Dans un premier temps on ne laisse pas les gens participer, s’investir. Après on a opté pour la démocratie, on a laissé les gens gérer leurs affaires à tous les niveaux. Mais la femme est privée de son droit à participer, aux affaires de la communauté. Si on oublie la femme, on oublie la moitié de l’humanité. Il faut un engagement politique au niveau des gouvernements et des citoyens. Il fallait faire des lois, une politique de développement. Il n’y a pas de paix sans développement, il faut l’égalité entre les deux sexes ».

Monsieur Kiflé Sélassié : « Il y a un déficit d’image de l’Ethiopie, une image contrastée. Il y a une richesse archéologique, deux montagnes. Il faut être conscient de la participation du peuple chrétien, au débat sur la démocratie avec les musulmans dans un pays de 78 millions d’habitants pour arriver à une démocratie. Deux principes, il faut respecter la religion, la religion est une affaire personnelle et le pays est le bien de tous, on ne se bat pas pour des questions religieuses. Le même droit, la même justice pour les 83 peuples. C’est une contribution que l’Ethiopie peut apporter ».

Jean-Claude Richez : « Il y a des similitudes avec ce que l’on dit sur les quartiers populaires en France. Il faut la reconnaissance en France d’une citoyenneté active, il faut libérer des espaces pour que les citoyens exercent leurs capacités. Il y a beaucoup d’associations qui contribuent à libérer les initiatives des citoyens (5000 à 8000 étudiants font par exemple de l’accompagnement scolaire). Il faut mobiliser l’investissement des citoyens. A Strasbourg, des citoyens ont pu s’investir dans le fonctionnement des équipements de proximité. Un deuxième axe consiste à multiplier les lieux de participation (conseil de jeunes), multiplier les occasions de s’investir dans la cité. Les associations ont pour rôle de pérenniser les mouvements. Lors d’ateliers de la citoyenneté : on calque les modes de participation sur le rôle des élus à la vie politique. Les modes de participation entre citoyens et élus, se résument à choisir entre telles ou telles options. Alors que dans une structure, l’auto organisation fait émerger les besoins, au sein d’espaces de fraternité (les gens peuvent s’exprimer lors de l’organisation de repas), les maires viennent en tant que citoyens. Qu’est-ce que vivre pour soi et vivre avec les autres. Exemple de papys, de mamies qui interviennent pour éviter le divorce de couples.

Ryadh : « Dans le milieu du handicap, on perd sa citoyenneté, pour aller voter, il faut des rampes. Qu’est-ce qu’on peut apporter de notre expérience pour éviter le handicap ? Ryadh explique son action dans les écoles. Une cassette sur les jeux para olympiques est visionnée. Les grandes familles de handicaps sont expliquées. Il faut avoir conscience qu’on est tous des handicapés. Des ateliers d’apprentissage de la langue des signes et un parcours en aveugle sont organisés. Qu’est-ce que le pire des handicaps ? « C’est d’être handicapé de la vie, de ne pas chercher à réaliser ses rêves. Les enfants comprennent qu’ils peuvent changer leur monde et le monde. La citoyenneté c’est être heureux, c’est être un ambassadeur du bonheur. Les enfants ont aussi mesurés différents lieux de leur commune, pour élaborer un projet d’accessibilité aux handicapés. Faire un acte citoyen, c’est regarder et s’occuper des autres.

Ruth Stégassy : Association Récit : Comment permettre à un individu d’être acteur de sa propre vie. 500 à 600 personnes organisent différents actions, dans différentes villes et mutualisent leurs expériences. Ils oeuvrent pour d’autres rapports humains». Il faut partir du citoyen. A Palerme, une mobilisation des citoyens contre la mafia sicilienne est organisée. Depuis 50 ans des générations ont été tuées par la mafia. En 1970, une guerre de la mafia a tué beaucoup de gens, des intellectuels, des membres de la bourgeoisie qui avait lutté contre la mafia. A 18 ans, j’ai assisté au meurtre d’un jeune de 18 ans et trouvé le nom de l’assassin. Plusieurs de mes amis ont été tués. En Italie, la Sicile est comme un état autonome, un état où il est possible de tout faire. Des gens se sont organisés contre la mafia, ont engagés un combat contre le silence. La mort devient un instrument pour gouverner. Le pays, les gens sont devenus muets, ils ne parlent pas. Etre libraire, c’est un métier dangereux, il ne faut pas lire, comprendre, être savant. Un silence contre l’identité des femmes siciliennes avec des enfants. Faire comprendre aux citoyens qu’on peut retrouver la vérité sans être tué. Le problème de ne pas parler, c’est l’holocauste des intelligences. Palerme, c’est la cinquième ville d’Italie. L’action consiste à aller dans les banlieues, à apporter des livres et à raconter des histoires. Des mythes de l’Europe du sud, raconter Antigone, dans un quartier occupé à 100% par la mafia. L’église s’est compromise avec la mafia. Sachant que les bibliothèques publiques ont été détruites, des gens qui travaillent dans un centre médical, ont crées dans une chambre une petite bibliothèque. Un exemple de courage familial, un jour des vieilles femmes amènent dans le centre médical un enfant. Il porte une arme, il marchait à côté de son père. L’enfant a pris un livre et il a dit : « maintenant on va écouter madame qui raconte des histoires ». Il faut inventer chaque jour, se plonger à l’intérieur des gens, trouver des petites choses. Les mafieux sont mes sœurs et mes frères ».

Monsieur Valentin, président de la francophonie, sénégalais. Il a participé aux actions du gouvernement sénégalais. « Au début de l’indépendance, il fallait changer le réel colonial dans lequel nous avions vécu. Plusieurs réformes ont eu lieu: La création d’un grand service d’animations rurales, pour se mettre à la portée des populations. Cette éducation citoyenne a eu des prolongements. Elaboration d’un nouveau code de la famille, qui a durée 11 ans. Un travail en partenariat avec les chefs religieux, car il fallait tenir compte des coutumes. Le président Senghor était chrétien, alors que la majorité du pays est musulmane. Le statut de la femme, a été revalorisé, la protection de l’enfance accrue. Les chefs religieux de chaque communauté ont acceptés le code. En 1970, des émissions radiophoniques ont données la parole aux paysans qui ont exprimés leurs problèmes. Des experts qui étudiaient la sécheresse ont appris des paysans. La carte semencière a été adaptée à la climatologie. L’éducation, la citoyenneté existaient d’un côté et pas de l’autre. Les citoyens n’allaient pas voter, puis cela a changé. Il y a eu un respect et une critique des institutions, une alternance politique dans le pays. La vie politique a été apaisée. Cette expérience politique a été observée par l’étranger ».

L’animateur : Les nouveaux médias, font-ils la promotion de la citoyenneté active. Le président de 4D réalise une encyclopédie du développement durable. La participation citoyenne est intéressante si elle s’articule autour d’un projet de transformation sociale, un constat pour aller vers une société différente, plus égalitaire, plus équitable.

Une participante indique qu’à Vénissieux, en 2005 un groupe d’habitants a organisé un mouvement de participation citoyenne, relaté dans « Diversité, altérité, modernité, la coopération décentralisée », L’Harmattant, Procoop.

Xavier Bolze, a participé à la commission nationale de débats publics ITER (nucléaire). Il a quitté le débat. « Des réunions techniques étaient organisées avec le public, toutes les personnes étaient à égalité. La question était quelle parole écouter ? Il faut exposer des arguments, pas des opinions puis recenser ces arguments, et répondre à chacun. Etablir un lien entre les échanges et les décisions politiques. Mais des parlementaires refusent la légitimité de ces débats. Le système français actuel, ne les prend pas en considération. De même que l’évaluation, le suivi des décisions ne se font pas. Les médias sont défaillants ».

L’animateur : « Quelle représentation politique, quelle participation citoyenne, quel débat politique. Quelle est la qualité des outils pour organiser le débat public. Le Grand Lyon a mis en place une démarche participative, sur les gros dossiers. Un nouveau régime de citoyenneté, ce n’est pas seulement s’organiser en parti et aller voter. Chacun est capable dans un régime démocratique de mobiliser ses capacités. Les NTIC contribuent à remettre en circulation la parole, favorise l’information, les échanges ». (DF c’est aussi un moyen d’organiser des actions citoyennes.

Madame Haïlé-Mickaël Tadelech : « Il faut donner une importance à chaque citoyen. Faire des actions reconnues à un niveau mondial pour lutter contre l’excision, le mariage précoce. Nous avons organisé des animations rurales : les médias diffusent dans les langues locales, actuellement 80 % de la population a bénéficié d’une éducation primaire. Les associations franco-éthiopienne situées à Paris et à Lyon, organisent des manifestations culturelles, font la promotion de l’Ethiopie. Un dialogue en humanité doit se réaliser entre nos deux peuples ».

Monsieur Kiflé Sélassié : « Il faut promouvoir une citoyenneté active. Autour d’une table, il y a celui qui préside et les autres. La palabre c’est s’exprimer donner un espace, un « rendez-vous donner/ recevoir (Senghor) ». Lorsqu’on écoute les citoyens, ils votent, si la parole est étouffée, les citoyens abandonnent le vote. Les NTIC peuvent être utiles où nous asservirent. Il faut rappeler qu’il y a des gens qui meurent pour voter. Les élus doivent avoir une pédagogie de l’écoute car les citoyens ont parfois une parole confuse. Il faut prendre la dimension du vécu, pour une démocratie active. Si les élus entendent les citoyens alors les programmes sont « du sur mesure qui fonctionnent ». En Ethiopie, mère de l’humanité, plus on connaît le monde extérieur, plus on se sent éthiopien. «

A la fin du débat, j’ai pu assisté à un moment de poésie, merveilleux et subtile. Monsieur Kiflé Sélassié a lu l’ensemble des poèmes, d’un de ses ouvrages à un jeune enfant qui était accompagné de son père. Il nous a fait découvrir la dédicace de monsieur Aimé Césaire. J’ai même eu droit à un inédit déclamé dans le hall.

DF : « L’humanité se tisse de rêves et de poésies, les âmes voyagent et se rencontrent. Ne faudrait-il pas réserver une place à la poésie aux Dialogues en Humanité ? »


FACE AUX LOGIQUES AUTORITAIRES, CONSTRUISONS UNE DEMOCRATIE DE QUALITE

Dimanche 8 juillet 2007, Agora, 15 à 16 heures. Il pleut nous sommes abrités au palais des congrès. Dans de grands espaces de briques, la pensée est plus facile à modeler, à mettre en forme, comme un jeu de Legos en somme.

Témoins de vie

Boris KAGARLITSKY, Russie. Sociologue du travail, syndicaliste et journaliste. Directeur de l’institut Russe de recherche sur la mondialisation, questionné par François BOUCHARDEAU, HB Editions. Boris KAGARLITSKY a publié « Voix rebelles du monde » HB Editions, il a grandi en URSS.

FB « Qu ’est-ce que cela a représenté comme changements? ».

BK « J’ai toujours habité dans la même rue…. », « J’ai été arrêté pour dissidence du temps de BREGNIEV, j’ai été accusé d’activités anti-soviétique et j’ai fait 13 mois de prison». « BREGNIEV est mort en 1993. ELSINE était député du Conseil, à l’Assemblée de Moscou. Après j’ai été accusé d’avoir une activité pro soviétique, (le contexte avait changé). L’idée d’une démocratie sociale est apparue ». « J’ai commencé ma vie politique dans un groupe de marxistes indépendants, qui dénonçaient la bureaucratisation et soutenaient la démocratie ». « Après la chute de L’Union Soviétique, le discours était contraire au capitalisme et en même temps l’idée d’une démocratie de marché était défendue. Mais la démocratie c’est pour les gens fait remarquer BK. « Du temps d’ELTSINE, j’étais toujours en dissidence, je n’aime pas cela, j’aimerais qu’on soit majoritaire ».

FB « Qu’est-ce qui t’a décidé à être en dissidence ? ».

BK « Ma formation culturelle, n’est pas très différente de celle d’autres pays, de la France. Lorsque j’ai été arrêté mon voisinage a dit : « il est fou ». Moi je voulais un marxisme, un socialisme démocratique. Il y avait un seul livre de cuisine qui s’appelait : Manger une alimentation de bon goût et bon pour la santé. On a même organisé la vie des écrivains, ils vivaient ensemble dans le même quartier. Du temps d’ELTSINE, il y avait de la corruption morale. Une classe très privilégiée, qui avait une bonne éducation, mais critiquait le système de l’URSS. Ma famille participait au mouvement révolutionnaire mais pas en tant que membre du parti bolchevik. Mon grand-père a été emprisonné pendant 18 ans. Il a été décoré et réhabilité. Il y avait une tradition gauchiste, révolutionnaire dans ma famille mais pas stalinienne. Il y a aussi l’Influence de livres qui n’étaient pas dans les bibliothèques ». BK s’est senti isolé dans ses idées. Il a suivi une formation universitaire de spécialiste du théâtre et de sociologie des cultures à l’université. « Je n’ai pas pu achever mes études car j’ai été arrêté (Perestroïka). Puis un jour, j’ai reçu un coup de téléphone du comité central du parti qui m’a demandé : « monsieur voulez-vous faire un diplôme professionnel, un doctorat en sciences politiques ? » (une récompense après la prison). J‘ai ensuite travaillé comme sociologue. Maintenant à Moscou, c’est devenu à la mode d’être gauchiste. MARCUSE, Samir AMIN sont publiés. Maintenant c’est plus facile de publier des auteurs opposés au capitalisme ».

FB « Vous êtes directeur de l’Institut Russe sur la mondialisation, c’est le meilleur institut de Russie ? »

BK « C’est facile d’être le meilleur, on est le seul institut, on n’a pas de concurrence, c’est un monopole. C’est comme le livre de cuisine dont j’ai parlé… C’est un institut qui est un pont entre la gauche russe et le mouvement international, (féministe, écologiste, défense des droits de l’homme, alter mondialiste). Nous avons organisé la participation au forum social de Londres et d’Athènes avec peu de ressources. C’est plus dur d’organiser un voyage en bus de Moscou à Londres que d’écrire un article. Nous ne sommes pas réunis comme des chercheurs mais comme des activistes, nous avons un travail de consultation auprès de syndicalistes, de groupes d’écologistes et de gauches. Le problème, c’est la centralisation. Il faut aller dans d’autres villes, pas à Moscou. En 2005, le premier forum a été un succès. En 2006, nous avons fait une erreur, nous avons organisé le forum en même temps que le G8 à Saint-Pétersbourg. La majorité a décidé de choisir la même ville et la même date que le G8. Les conséquences ont été la répression, 300 personnes ont été arrêtées avant le forum, puis libérées 3, 4 jours après. Le problème c’est que vous ne devez pas exposer vos camarades à une répression non nécessaire. Le forum était dominé par des groupes de gauche sectaires, anarchistes, troskistes qui contrôlaient le forum. Les activistes n’étaient pas assez présents. On a accepté que le forum se tienne dans un stade, qu’on a appelé le « Pinochet stadium ». On a créé nous-même un camp de concentration. .. . Les gens sont entrés et sont ressortis, une femme a dit que « ce que tu as vécu illustre l’absurdité ».

FB « Quelle est la synthèse que tu fais de ces changements »

BK « Certains amis russes regrettent l’Union Soviétique. CHADEV, philosophe du 19ème siècle, a écrit sur le sens de l’histoire. Le destin de la Russie est important car nous devons donner une leçon importante. Mais il ne faut pas répéter le passé, Nicolas 1er, Pierre 2. Le processus de la révolution n’est pas terminé. En 1834, en France la situation était aussi absurde, le résultat n’était pas formidable. C’était plus ou moins identique culturellement et psychologiquement. Le gouvernement de POUTINE dit qu’il a des choses positives mais nous nous ne sommes pas d’accord pour avoir une grande armée, seulement pour ce qui concerne le logement, l’emploi et l’éducation.

FB « Vous êtes isolé maintenant dans la société ? »

BK « Maintenant la société est devenue plus à gauche. Mais cela ne c’est pas traduit dans la vie politique, il n’y a pas de représentativité ». Il y a un problème de distance entre le processus social et la représentativité. En Russie c’est de la démocratie contrôlée, c’est le gouvernement qui décide. Le mouvement syndical est devenu important. Ils sont dans les secteurs stratégiques, ceux qui ont connus une croissance astronomique (automobile, transport, pétrole, ..). Il y a une législation contre les grèves mais il y a des grèves et des grèves sont gagnées. L’opinion publique se mobilise, les classes moyennes sont favorables aux grèves. Beaucoup travaillent avec les syndicats, participe à la création de nouveaux mouvements (centralisés, bureaucratisés). C’est un espoir car chaque jour, il y a des luttes et des victoires.

FB « La perception en France, c’est qu’on parle de pouvoir autocratique, de la Tchétchénie, on ne parle pas de la société en mouvement »

Jean-Marie CHOVIER « On oubliait que des gens essayaient de résister, de se battre, il y a une victoire de la société civile ».

 BK « Il y a eu une victoire de la société civile, contre la monétisation. C'est-à-dire l’abolition des privilèges aux étudiants, aux malades, c’était un avantage symbolique, une compensation en monnaie. La loi 132, prévoyait d’arrêter de donner des réductions. Deux millions de personnes étaient dans la rue. La police n’est pas trop intervenue car leurs avantages étaient également supprimés. Le gouvernement a changé, c’est comme en France pour vous avec le CPE. Il y a des différences entre la France et la Russie mais ce n’est pas une autre planète, c’est le même monde. En Russie, les émeutes en France ont été présentées comme des émeutes des étrangers. En Russie, les étrangers ne peuvent travailler dans des administrations. Maintenant on a des restrictions d’emploi dans le privé. Beaucoup de russes ont un passeport pour travailler dans une ville. Le propiska a été remplacé par l’enregistrement. On doit avoir un tampon de la police. Certaines personnes pour rester dans une ville achètent régulièrement des billets d’avions qu’elles n’utilisent pas pendant plusieurs années pour faire croire qu’elles ne séjournent pas régulièrement dans une ville.   

                                                             Danielle FALQUE, 16 août 2007